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Tribunal correctionnel d'Anvers, division Anvers, 4 novembre 2020

Le supporter d'une équipe de football a publié un message sur une page Facebook. Le texte disait : “Mon père était à la gestapo, ma mère chez les SS et ensemble ils ont brûlé des juifs car ce sont les Juifs qui brûlent le mieux“.

[Avertissement : les jugements et arrêts peuvent contenir un langage offensant].

Publié : 04/11/2020
Domaine(s) : Média et médias sociaux, Sport
Critère(s) de discrimination : Racisme
Infraction(s) à la loi : Discours de haine, Délit d’incitation, Interdiction de diffusion
Pouvoir judicaire : Tribunal correctionnel
Juridiction : Anvers
Unia partie (civile) : oui

Les faits 

A l’occasion d’un match en avril 2018 entre les 2 clubs anversois du Beerschot et de l’Antwerp, des chants anti-juifs avaient été entendus dans le stade et une banderole représentant une étoile de David barrée avait été accrochée dans les gradins. Suite à cela le ministère public avait ouvert une information. Dans le cadre de cette enquête, un message posté sur Facebook a attiré l’attention des enquêteurs. Le responsable d’un club de supporters du Beerschot y exhortait à entonner lors du match le chant suivant : “Mon père était à la gestapo, ma mère chez les SS et ensemble ils ont brûlé des juifs car ce sont les Juifs qui brûlent le mieux“. Ce message avait donné suite à des réactions en lien avec Hitler, la chasse aux juifs et la Shoah. Le chant a également été entonné le jour du match.  

Unia était partie civile dans ce procès. 

Qualification juridique 

Le ministère public avait poursuivi le prévenu pour:

  • Diffusion des idées fondées sur la supériorité ou la haine raciale (article 21 loi antiracisme 1981 telle que modifiée en 2007 – actuellement article 251 Code pénal).
  • Incitation à la haine ou à la violence à l’égard d’un groupe, d’une communauté ou de leurs membres (article 20, 4° loi antiracisme 1981 telle que modifiée en 2007  – actuellement article 250, 4° Code pénal).

Décision  

Le tribunal correctionnel a estimé les 2 préventions établies.  

Alors que le prévenu invoquait le fait que son message avait un caractère ludique et s’inscrivait dans le contexte de rivalité entre supporters des deux clubs, le tribunal correctionnel a estimé qu’il y avait bien une certaine intention d’inciter à la haine. 

Le juge constate ainsi que « la rivalité footballistique dans laquelle un groupe est associé à un groupe de population particulier (NDLR : les supporters de l’Antwerp sont surnommés « les juifs » par certains adversaires) ne permet pas pour autant de faire des déclarations antisémites, discriminatoires ou racistes ». 

Le tribunal correctionnel remarque en outre que la nature des réactions à ce message dépasse le cadre du football et est liée au nazisme. 

Enfin, en tant que président d’un club de supporters le prévenu avait une certaine responsabilité et son message constituait clairement un appel à entonner ce chant antisémite, ce qui s’est d’ailleurs produit lors du match. 

Le prévenu a été condamné à une peine de travail de 50 heures et Unia a reçu 500 euros à titre de dédommagement. 

Points d'attention 

C’est une des rares condamnations en matière de racisme dans le football, où il est n’est pas toujours facile de pouvoir identifier les auteurs et de démontrer leur intention haineuse. Il s’agit ici d’une condamnation sans équivoque de chants assez régulièrement entendus dans certains stades sous le prétexte d’un contexte folklorique entourant le football.  

Cette condamnation s’inscrit dans une volonté grandissante des acteurs du monde du football de combattre ce phénomène des chants discriminatoires dans les stades. L’Union Belge de football présentait récemment son plan d'action our la discrimination et le racisme.  La Pro League avait quant à elle publié l’an dernier son manuel afin de contrer les chants racistes et discriminatoires.  

Unia était partie à la cause.

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