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Unia et le CCSP alertent sur la situation catastrophique des détenus nécessitant des soins psychiatriques

5/06/2025
  • Communiqué de presse
  • Handicap

Unia et le CCSP (Conseil central de surveillance pénitentiaire) publient un rapport sur la prise en charge de la santé mentale en prison. Plusieurs années après les nombreuses condamnations de la Belgique par la Cour européenne des droits de l’homme concernant le maintien prolongé de personnes internées dans les ailes psychiatriques des prisons en l’absence de soins appropriés, le rapport dresse des constats alarmants. En réponse, il formule des recommandations destinées aux autorités et acteurs concernés. L’objectif : garantir, sans délai, le respect des droits humains et assurer à tout détenu avec des troubles psychiques des soins adaptés à leurs besoins, condition indispensable à une réinsertion effective.

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Anne Salmon

Attachée de presse

Contexte : une situation de crise

Aujourd’hui encore, plus de 1.000 personnes internées se trouvent dans les prisons belges sans y recevoir les soins adaptés et l’État belge ne prend pas les mesures adéquates pour endiguer ce problème. Le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe a d’ailleurs adopté une résolution intérimaire appelant notre pays à mettre fin aux violations des droits fondamentaux des personnes internées par la création de places dans des structures de soins extérieures aux prisons. Le Comité recommande également de mettre en place de véritables trajets de soins afin de faciliter le transfert et la sortie des personnes internées, tout en renforçant, à court terme, l’offre de soins en prison, tant pour les internés que pour les autres détenus avec de troubles psychiques. Un nombre important de personnes détenues avec des problématiques de santé mentale ou en situation de vulnérabilité renforcée nécessitent aussi des soins de manière urgente.

Le CCSP et Unia ont visité cinq établissements pénitentiaires dotés d’une annexe psychiatrique ou d’une section de défense sociale. Ces visites ont démontré l’urgence et la gravité de la situation.

Constats alarmants

Les constats faits lors des visites par Unia et le CCSP sont alarmants :

  • Des soins gravement déficitaires : dans plusieurs prisons, le personnel soignant souffre d’une grave pénurie. À certains endroits, un seul psychiatre présent quelques heures seulement par semaine doit suivre jusqu’à 200 patients. Tout accompagnement sur mesure est rendu impossible. Le personnel de surveillance, également en sous-effectif, n’est ni formé ni soutenu pour accompagner ce public vulnérable.
  • Des conditions de vie indignes : la surpopulation carcérale, la vétusté des infrastructures, le manque d’hygiène et l’insuffisance des espaces propices au soin rendent les conditions de détention contraires à la dignité humaine. Certains patients dorment à même le sol ou partagent leur cellule avec des détenus sans besoins spécifiques, augmentant ainsi leur vulnérabilité.
  • Un manque criant de perspective : faute d’activités, de personnel et de locaux disponibles, les patients passent la majorité de leur temps en cellule, avec les conséquences qui en découlent sur la santé mentale, la baisse de motivation et le comportement. De plus, de nombreuses personnes internées attendent de nombreuses années qu’une place se libère à l’extérieur, sans avoir la garantie d’y être admises.
  • Une logique sécuritaire dominante : la philosophie carcérale repose davantage sur la gestion du risque, au détriment d’une approche axée prioritairement sur le soin. Les sanctions disciplinaires et les mesures de sécurité, telles l’isolement, aggravent l’état des personnes les plus fragiles.
  • Une invisibilisation des besoins spécifiques : les patients avec des besoins spécifiques n’ont que rarement accès aux aménagements requis. Les personnes avec un handicap moteur ou sensoriel évoluent dans un environnement totalement inaccessible, les patientes se voient davantage refuser l’accès aux soins et activités thérapeutiques tandis que les personnes internées sans titre de séjour demeurent incarcérées faute de pouvoir financer une structure de soin.

Dans de telles conditions, il est légitime de se demander si ce système favorise la réinsertion des patients-détenus ou, au contraire, organise leur désintégration.

Recommandations

Le CCSP et Unia formulent 87 recommandations aux Ministres de la Justice et de la Santé, à l'administration pénitentiaire, aux directeurs de prison, à la Régie des Bâtiments et au législateur. Les deux institutions enjoignent ces instances à garantir le respect des normes de droit national et international.

« Le séjour en prison des personnes avec des troubles mentaux doit être interdit. Il faut promouvoir des alternatives à la détention pour toutes ces personnes, en soutenant leur recherche d'hébergement et de soins », déclare Marc Nève, président du CCSP. Patrick Charlier, directeur d'Unia, ajoute : « Nous plaidons avant tout pour leur accès à des soins ambulatoires ou résidentiels ouverts, où l'autonomie des patients est stimulée. Les établissements de soins de haute sécurité, tels que les centres de psychiatrie, n'offrent une solution que pour un groupe limité de détenus. »
  • Handicap

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