Handicap intellectuel et inclusion scolaire : la Belgique à nouveau condamnée par le Comité européen des Droits sociaux

3 Février 2021
Domaine d'action: Enseignement
Critère de discrimination: Handicap

Trois ans après la condamnation de la Belgique pour défaut de garantir en Communauté flamande le droit à l’éducation inclusive des enfants présentant une déficience intellectuelle, le Comité européen des Droits sociaux rend publique sa décision concernant l’enseignement en Fédération Wallonie-Bruxelles : la Belgique est à nouveau condamnée.

Le Comité, suivant l’avis d’Unia, donne raison à la Fédération internationale des Droits humains (FIDH) et Inclusion Europe et condamne la Fédération Wallonie-Bruxelles pour le manque d’efforts consentis pour l’inclusion scolaire des élèves en situation de handicap intellectuel. Le Comité reconnait sans ambiguïté l’existence d’une violation de la Charte sociale européenne (révisée). 

En reconnaissant que le droit effectif à une éducation inclusive n’est pas garanti pour les élèves avec une déficience intellectuelle en Fédération Wallonie-Bruxelles, le Comité met en lumière la violation d’autres conventions internationales des droits humains. Notamment, la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées (CDPH) dont Unia a été mandaté pour veiller à son respect.

Lors d’une conférence de presse conjointe, ce 3 février 2021, Unia, le Délégué général aux droits de l’enfant et la Ministre de l’Éducation en Fédération Wallonie-Bruxelles ont tenu à commenter cette condamnation et envisager l’avenir, ensemble malgré des priorités parfois différentes, dans le meilleur intérêt des enfants. 

Demandes d’Unia en association avec Inclusion, la FIDH et le Délégué général aux droits de l’enfant : 

  1. La consultation des associations représentatives des personnes en situation de handicap intellectuel dans l’élaboration, l’exécution et l’évaluation des lois qui les concernent. Lorsqu’une réforme est envisagée pour rendre le système scolaire plus inclusif, elles doivent être étroitement impliquées, avec les autres associations représentatives des personnes en situation de handicap. La CDPH l’exige : « Rien sur nous sans nous ». Les enfants et les jeunes en situation de handicap doivent aussi être entendus, conformément à la CIDE.
  2. L’adoption d’un plan de transition vers un système d’enseignement inclusif.  Le Comité des droits des personnes handicapés le recommandait déjà en 2014, ainsi que le Comité des droits de l’enfant en 2019. 
  3. De prendre en compte les enfants porteurs d’une déficience intellectuelle dans l’ensemble des textes visant à rendre l’école plus inclusive (pôles territoriaux, aménagements raisonnables).
  4. De prévoir des normes d’encadrement différentes pour les écoles ordinaires accueillant ce public.
  5. De permettre le déplacement du surcoût d’un enfant dans le spécialisé au profit de l’école ordinaire qui l’accueille.
  6. Intégrer les dispositifs d’accompagnement organisés au niveau des régions (Phare et Aviq) pour soutenir et améliorer la prise en charge des enfants par les équipes éducatives de l’ordinaire.
  7. Renforcer la formation initiale et continuée des enseignants.

L’engagement politique 

La Ministre de l’Éducation, Caroline Désir a souligné pendant la conférence de presse que la Fédération Wallonie-Bruxelles offre déjà aux élèves qui présentent une déficience intellectuelle :

  • un enseignement spécialisé de qualité ;
  • l’intégration permanente totale pour les élèves qui ont réellement fréquenté l’enseignement spécialisé, et ce tout au long de leur scolarité le cas échéant;
  • 17 classes à visée inclusive (niveaux fondamental et secondaire).

Elle est toutefois parfaitement consciente qu’il faut aller plus loin.

La Ministre insiste sur l’importance de permettre aux différents acteurs de se confronter et de faire évoluer les représentations des uns et des autres sur le handicap. Mais la construction d’une école plus inclusive ne repose pas que sur des décrets, des feuilles de route ou des études. Cette construction est aussi un choix de société.

Dans cette perspective, la Ministre souhaite organiser une table ronde sur la prise en charge des élèves déficients intellectuels. Cette table ronde rassemblera notamment les différents ministres ayant en charge le secteur du handicap dans leurs compétences et ce à tous les niveaux de pouvoir, des représentants des associations de parents, des représentants des associations qui accompagnent ces élèves sur le terrain, des représentants des acteurs de terrain tels que les membres du personnel de l’enseignement spécialisé et ordinaire, les directions qui ont ces élèves dans leurs classes, des représentants des acteurs institutionnels, le Délégué général aux droits de l'enfant et Unia.

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