À quelles conditions peut-on parler de discrimination ?
Selon la législation antidiscrimination, on peut parler de discrimination si on vous traite différemment qu’une autre personne dans une situation comparable sans que cette distinction puisse être justifiée. Sachez que toute distinction n’est pas une discrimination (interdite) et que la législation antidiscrimination ne s’attaque pas à toutes les formes de discrimination.
Pour pouvoir parler de discrimination, vous devez pouvoir répondre par l’affirmative à chacune des questions suivantes :
1. Y a-t-il un lien avec une caractéristique protégée ?
La distinction doit porter sur une caractéristique personnelle protégée par la législation antidiscrimination. Ces caractéristiques protégées sont entre autres la prétendue race, la couleur de peau, l’ascendance, l’origine nationale ou ethnique, l’orientation sexuelle, l’âge, le handicap, la conviction philosophique ou religieuse, l’état civil et la composition de ménage, l’état de santé et les caractéristiques physiques ou génétiques, la fortune, la conviction politique, la conviction syndicale, l’origine ou la condition sociale ainsi que la langue.
Toutes les caractéristiques personnelles ne sont pas protégées par la législation antidiscrimination.
Exemple : certaines communes appliquent des tarifs différents pour les non-résidents en ce qui concerne l’accès à leurs installations sportives. La caractéristique personnelle « habiter dans une certaine commune » n’est donc pas protégée par la législation antidiscrimination. Par conséquent, la distinction qui est faite ne peut être jugée en vertu de cette législation.
Bon à savoir : les caractéristiques protégées peuvent être :
- réelles ou supposées :
- réelles : par exemple si vous êtes vous-même homosexuel et que pour cette raison vous êtes victime d’une discrimination.
- supposées : par exemple si vous êtes victime d’une discrimination parce que l’auteur de celle-ci pense ou suppose que vous êtes homo alors que ce n’est pas le cas.
- personnelles ou attribuées par association :
- personnelles : par exemple si vous êtes vous-même en situation de handicap.
- par association : par exemple si des parents sont discriminés en raison du handicap de leur enfant.
- une caractéristique unique ou une combinaison avec d’autres caractéristiques protégées :
- discrimination intersectionnelle : une personne est discriminée en raison d’une distinction fondée sur plusieurs critères protégés qui sont indissociables et qui interagissent entre eux. C’est par exemple le cas lorsqu’une femme portant un foulard islamique se voit refuser l’entrée dans un club de sport. Les caractéristiques protégées « genre » et « conviction religieuse » interagissent dans ce cas et deviennent indissociables (un homme musulman ou une femme sans foulard seraient admis).
- discrimination multiple cumulative : une personne est discriminée en raison d’une distinction fondée sur plusieurs caractéristiques protégées qui s’additionnent mais qui peuvent être dissociées. Par exemple, un homme âgé n’est pas engagé parce qu’on juge qu’il ne s’intègrerait pas dans une équipe de jeunes femmes.
- discrimination multiple successive : une personne est discriminée sur la base de plusieurs critères et que ces discriminations ont lieu de manière distincte et à différents moments, on parle de discrimination multiple successive. Par exemple, un homme homosexuel issu d’une minorité ethnique peut être discriminé en raison de son orientation sexuelle dans une situation et de son origine dans une autre.
Les caractéristiques protégées sont génériques
La législation antidiscrimination protège donc aussi bien les minorités que les majorités :
- les personnes homosexuelles, mais aussi celles qui sont hétérosexuelles
- les personnes âgées, mais aussi les jeunes (et tout autre âge)
- les personnes de couleur, mais aussi les personnes blanches
- les personnes croyantes, mais aussi celles qui ne le sont pas…
2. Est-ce que la distinction se produit dans l’un des domaines auxquels s’applique la législation antidiscrimination ?
La législation fédérale antidiscrimination s’applique dans les domaines suivants de la vie sociale :
- l’accès à l’offre de biens et de services à la disposition du public ;
- la protection sociale, y compris la sécurité sociale et les soins de santé ;
- les prestations sociales ;
- les régimes complémentaires de sécurité sociale ;
- l’emploi (relations de travail) ;
- la mention dans un document officiel ou un procès-verbal ;
- l’affiliation à… ou l’implication dans une organisation d’employeurs ou de travailleurs ou toute organisation dont les membres exercent une certaine profession, en ce compris les avantages offerts par ces organisations ;
- l’accès et la participation à une activité économique, sociale, culturelle ou politique ouverte au public ainsi que tout autre exercice de cette activité.
D’autres domaines relèvent des compétences des Communautés et des Régions, comme par exemple la location de logements, les transports publics régionaux, la culture, l’enseignement…
L’approche des discriminations dans ces matières est régie par les décrets et ordonnances des Communautés et des Régions.
Bon à savoir : la législation antidiscrimination ne s’applique pas à la sphère privée.
Chez vous, vous êtes libre d’inviter qui vous voulez. Vous ne pouvez pas non plus être accusé de discrimination parce que, par exemple, vous êtes client de la boulangerie A et que vous passez systématiquement devant la boulangerie B sans y entrer. L’inverse n’est pas vrai : en tant que fournisseur de biens, le boulanger ne peut pas discriminer des clients.
3. S’agit-il d’un comportement interdit selon la législation antidiscrimination ?
Il ne suffit pas qu’une distinction soit faite sur la base d’une caractéristique protégée. Il doit aussi s’agir de l’un de ces comportements interdits :
Ouvrir Une discrimination directe
Une discrimination directe est une distinction directe fondée sur une ou plusieurs caractéristiques protégées et qui ne peut pas être justifiée au regard des dispositions de la législation antidiscrimination. On parle de discrimination directe lorsque quelqu’un est traité de manière moins favorable qu’une autre personne dans une situation comparable sur la base d’une ou de plusieurs caractéristiques protégées.
Exemple : les clients appartenant à certaines catégories de la population ne sont pas admis dans un café.
Ouvrir Une discrimination indirecte
Une discrimination indirecte est une distinction indirecte fondée sur une ou plusieurs caractéristiques protégées et qui ne peut pas être justifiée au regard des dispositions de la législation antidiscrimination. On parle de discrimination indirecte lorsqu’une disposition, une norme ou une pratique apparemment neutre risque de désavantager particulièrement des personnes présentant une ou plusieurs caractéristiques protégées par rapport à d’autres personnes. Exemple : une personne accompagnée d’un chien d’assistance se voit refuser l’entrée d’un café à cause d’une interdiction générale d’accès pour les chiens.
Ouvrir Le harcèlement
Le harcèlement est un comportement indésirable lié à une ou plusieurs caractéristiques protégées, qui a pour objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité de la personne et de créer un environnement menaçant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant.
Exemple : un chef de chantier fait à longueur de journée des remarques et des plaisanteries racistes à un travailleur d’origine étrangère.
Ouvrir Le refus d’aménagements raisonnables
Le refus d’aménagements raisonnables : les aménagements raisonnables sont des mesures appropriées qui sont prises dans une situation concrète et selon les besoins pour permettre à une personne en situation de handicap d’accéder, de participer et de progresser dans les domaines couverts par la législation antidiscrimination, à moins que ces mesures n’imposent une charge disproportionnée à la personne qui doit les prendre.
Exemple : une école refuse d’aménager une rampe d’accès pour les usagers en fauteuil roulant.
Ouvrir L’injonction à discriminer
L’injonction à discriminer : il s’agit de tout comportement qui incite à discriminer une personne, un groupe, une communauté ou l’un de leurs membres sur base d’une ou de plusieurs caractéristiques protégées.
Exemple : un employeur charge une agence d’intérim de ne sélectionner que des hommes blancs de moins de 30 ans.
4. La distinction est-elle faite sans raison valable ?
En cas de discrimination éventuelle, il faut aussi examiner de plus près la distinction qui est faite :
- La distinction est parfois justifiée : une personne mineure ne peut pas conduire une voiture, une personne malvoyante ne peut pas devenir pilote de ligne, une personne qui n’a pas de brevet de natation ne peut pas devenir maître-nageur...
- La distinction n’est pas justifiée ? C’est dans ce cas seulement qu’il s’agit d’une discrimination (interdite). Ainsi, il ne serait pas justifié de refuser une personne qui remplit toutes les conditions pour devenir pilote simplement parce qu’elle est noire de peau ou de refuser un candidat qui remplit toutes les conditions pour devenir maître-nageur parce qu’il est homosexuel.
Les mécanismes de justification de la législation antidiscrimination sont complexes et peuvent différer en fonction de la caractéristique protégée, du domaine et du comportement interdit :
- Dans certains cas, une distinction ne peut jamais être justifiée. Par exemple, le propriétaire d’un magasin refuse l’accès à un homme noir de peau.
- Dans certains cas, une distinction peut être objectivement justifiée par un objectif légitime, pour autant que les moyens pour atteindre cet objectif soient appropriés et nécessaires. Par exemple, une femme âgée en mauvaise santé possède un appartement qu’elle donne en location et qui est situé au-dessus de l’appartement où elle vit elle-même. Elle préfère avoir un ou une locataire d’à peu près son âge.
- Dans certains cas, une distinction peut être justifiée par une exigence professionnelle essentielle et déterminante. Par exemple, un théâtre souhaite engager quelqu’un pour interpréter le rôle de Nelson Mandela et recherche un acteur ayant une certaine ressemblance avec Nelson Mandela.
- Dans certains cas, une distinction peut être justifiée par une raison générale (telle qu’une disposition légale). Par exemple, une femme de 30 ans ne peut pas poser sa candidature pour une convention de premier emploi. Cela résulte d’une disposition légale, le législateur ayant fixé à 26 ans l’âge limite pour ce contrat.
Bon à savoir : la législation antidiscrimination ne s’applique pas lorsqu’une distinction résulte d’une disposition contenue dans une loi, un décret ou une ordonnance.
- Dans certains cas, une distinction peut être justifiée par des raisons spécifiques. Par exemple, dans le domaine des régimes complémentaires de sécurité sociale, une distinction directe fondée sur l’âge ne constitue pas une discrimination lorsque des critères d’âge sont utilisés dans les calculs actuariels, à condition qu’elle n’entraîne pas une discrimination fondée sur le sexe.
4 x oui = discrimination !
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